Laboratoire commun ST-IEMN Pascal Ancey : plus de vingt ans de collaboration dans le domaine de la microélectronique et de la photonique

Innovation

Inauguré en 2003, le laboratoire commun associe la société STMicroelectronics, un des leaders mondiaux de la production de semiconducteurs, à l’Institut d’Électronique, de Microélectronique et de Nanotechnologie. Le 11 juin 2025, il a été renouvelé pour cinq ans par les partenaires au cours d’une signature sur le stand du CNRS à Vivatech.

Vingt ans d’excellence académique et industrielle


Emmanuel Dubois, directeur de recherche au CNRS, responsable du groupe Silicon Microelectronics et co-directeur du laboratoire commun revient sur l’origine de la collaboration : « au début des années 2000, le secteur se trouvait dans une période d’incertitude technologique et devait faire face à des défis complexes en ce qui concerne la miniaturisation : c’était la fin du ‘happy scaling’ et il ne “suffisait” plus de réduire les dimensions pour atteindre les gains en performance et densité d’intégration que prophétisait la loi de Moore. En tant que chercheurs, la période était excitante car elle permettait d’étudier des pistes non conventionnelles que l’on dénommait ‘boosters technologiques’. Nous avions à la fois une opportunité et une responsabilité incroyables, celles d’épauler la capacité d’innovation d’un fleuron industriel européen des semiconducteurs. » 

STMicroelectronics développait alors des technologies intégrées Silicium (de type CMOS et BiCMOS) mais aussi des systèmes MEMS (micro-electro-mechanical systems) et était intéressé par l’expertise de l’Institut d’Électronique, de Microélectronique et de Nanotechnologie1  sur ces sujets, ainsi que sur d’autres domaines liés comme l’élaboration de circuits innovants pour les communications mobiles (à l’époque pour la 3G). 

Vingt ans plus tard, le bilan du laboratoire commun est révélateur de son succès. Tout d’abord, 936 contributions scientifiques ont été diffusées dans des revues ou lors de conférences. Andreia Cathelin, directrice technique conception de circuits avancés, Technology R&D Fellow chez STMicroelectronics et co-directrice du laboratoire commun, souligne le soutien de STMicroelectronics à la publication, « un moyen de faire reconnaitre la valeur scientifique de l’entreprise et de communiquer sur l’innovation ».

Sur le plan industriel, 65 brevets prioritaires et 135 extensions de brevets ont été déposés. 

Plus de 100 thèses ont été menées au sein du laboratoire commun. Un quart des docteurs formés poursuivent une carrière chez STMicroelectronics, et une dizaine a rejoint la recherche académique. 90% d’entre eux travaillent toujours dans le domaine des semiconducteurs. Le doctorat, un axe important de formation par et pour la recherche et l’innovation, pour un secteur qui a de forts besoins en expertise. 

Enfin, le laboratoire commun a fait preuve de son efficacité dans la recherche de financements. Il a été lauréat de plus de 30 programmes nationaux et européens, mettant en œuvre de nombreux partenariats avec d’autres structures au sein de l’écosystème qu’il contribue à dynamiser. 

Une collaboration scientifique et humaine


Outre ces résultats, Andreia Cathelin explique la longévité du laboratoire commun par les affinités qui associent les équipes côté IEMN et STMicroelectronics. « Le site R&D de STMicroelectronics à Crolles a été moteur au lancement du projet, notamment parce que de nombreux collaborateurs – dont je fais partie – avaient réalisé leur thèse à l’IEMN. Il était donc important de continuer à travailler avec des experts que nous connaissions. Depuis, d’autres divisions de l’entreprise, y compris produit, se sont greffées au laboratoire commun, avec la même proximité de pensée et confiance mutuelle », salue-t-elle. 

Emmanuel Dubois partage cet avis, et note une coopération fluide malgré la distance géographique (l’IEMN se situe à Villeneuve-d’Asq, à quelques kilomètres de Lille, et les équipes R&D de STMicroelectronics en région grenobloise). 

Chaque année, un workshop regroupe doctorants, postdoctorants, étudiants et collaborateurs de STMicroelectronics à Crolles, afin de diffuser les recherches du laboratoire commun au sein de tous les groupes de STMicroelectronics et également de rapprocher les étudiants et le monde de l’entreprise. 

Ce lien humain est sensible dans le nom du laboratoire, renommé Pascal Ancey d’après son premier directeur. Décédé en 2013, Pascal Ancey était membre de STMicroelectronics et chercheur de renommée mondiale dans le domaine des systèmes MEMS.  

Signature du renouvellement du laboratoire commun ST-IEMN Pascal Ancey sur le stand du CNRS à Vivatech © David Pell/CNRS

Des axes de recherche pluriels  


Les reconductions du laboratoire commun offrent l’opportunité de réaffirmer la feuille de route scientifique. Pour cette nouvelle phase, quatre axes de recherche ont été définis, chacun co-dirigé par une équipe mixte IEMN/STMicroelectronics. 

La première thématique porte sur le potentiel des technologies silicium pour la radiofréquence et les ondes millimétriques. Elle participe aux études de faisabilité en vue du déploiement de circuits innovants pour adresser les réseaux 5G et 6G à venir, et plus généralement à l’avenir des communications sans fil. 

La deuxième thématique concerne l’application de l’intelligence artificielle dans les circuits intégrés très faible consommation de type Internet des Objets (IoT). Andreia Cathelin, qui co-supervise cet axe, le relie à la stratégie de STMicroelectronics : « cette nouvelle génération de circuits bénéficie de nos technologies, notamment le FD-SOI CMOS (Fully-Depleted Silicon on Insulator), une de nos technologies phare. »

L’exploration de la métrologie acoustique à haute fréquence constitue la troisième thématique, et la feuille de route se conclut par le packaging fonctionnel et la microthermique. Emmanuel Dubois, co-responsable de cette thématique, l’explique ainsi : « en considérant des puces fabriquées au nœud technologique de quelques nanomètres, on s’approche de plus en plus de la granularité de la matière, et il devient extrêmement difficile et coûteux d’industrialiser ce type de technologie. Alternativement, on peut trouver des marges de progression en densité d’intégration et en multiplication des fonctionnalités dans l’intégration des systèmes, un assemblage hétérogène d’une multitude de puces, dont le ‘smartphone’ constitue un exemple emblématique. »

Soutenir les transitions 


Les domaines qui peuvent bénéficier des travaux du laboratoire commun sont nombreux : télécommunications, internet des objets, aide au bien-être et à la santé … Améliorer l’efficacité des circuits intégrés, de la conception à la production, permet également de réduire leur consommation énergétique. « On retrouve des enjeux importants de développement durable dans la fabrication des circuits intégrés, et STMicroelectronics possède un programme ambitieux, avec un objectif de neutralité carbone d’ici 2027 », indique Andreia Cathelin. 

Pour Emmanuel Dubois, le laboratoire commun contribue à l’excellence française dans un domaine stratégique, soutenant la souveraineté européenne dans ce secteur. Il conclut : « si on veut répondre aux grands défis sociétaux, nourrir la planète, accélérer les transitions énergétique et industrielle, soutenir les technologies de la santé… on constate que la transition numérique est elle-même un moteur des autres transitions, et c’est notre responsabilité de le faire de manière durable. »

  • 1IEMN - CNRS/Université de Lille/Université Polytechnique Hauts-de-France/Junia/Centrale Lille Institut