Laboratoire commun Starlight+ : 10 ans de recherche sur les lasers à fibre de haute qualité

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Le LP2N et l’entreprise TOPTICA Photonics SAS ont fêté les dix ans de leur laboratoire commun, Starlight+. Forts de leurs réussites autour des lasers à fibre de haute puissance, les deux partenaires entendent poursuivre leur fructueuse collaboration, afin notamment de répondre aux exigences des ordinateurs quantiques.

Créée en 2010, la société TOPTICA Photonics SAS (anciennement Azurlight Systems) produit des lasers et des amplificateurs à fibre, pour des applications de métrologie de haute précision dans l’industrie ou de fabrication d’ordinateurs quantiques. « Notre technologie repose sur des fibres optiques d’apparence classique, mais avec une particularité : en leur cœur se trouvent des atomes de terres rares, telles que l’ytterbium, venant amplifier le signal laser », explique Germain Guiraud, responsable R&D de TOPTICA Photonics SAS. « Cela nous permet de proposer des lasers monofréquences, à haute puissance et à bas bruit, des caractéristiques essentielles pour les applications de nos clients. »

Des expertises complémentaires pour une collaboration à long terme


Tout le défi réside dans ce triple objectif : délivrer une puissance élevée, mais avec le bruit le plus faible possible, tout en maintenant les propriétés spectrales recherchées. Pour le relever, l’entreprise s’est rapidement rapprochée du Laboratoire Photonique, Numérique et Nanosciences (LP2N, CNRS/Institut d'Optique Graduate School/Université de Bordeaux). « En tant que fabricant de lasers, nous maîtrisions leur conception, leur production, la compréhension des mécanismes physiques en jeu, mais nous cherchions une expertise complémentaire à la nôtre », se souvient Nicholas Traynor, président de TOPTICA Photonics SAS. « Il s’agissait notamment de savoir mesurer finement un bruit extrêmement faible, afin de parvenir à le réduire encore davantage. Nous avons trouvé ces compétences auprès de Giorgio Santarelli, du LP2N, un laboratoire né peu de temps après la création d’Azurlight Systems. »

Déterminés à travailler ensemble au plus vite, les deux partenaires ont alors répondu à un appel à projets de l’Agence nationale de la recherche (ANR). Une candidature retenue ayant ainsi donné naissance, en octobre 2014, au laboratoire commun Starlight+, prévu pour une durée initiale de trois ans. « Mais nous étions d’emblée convaincus que notre collaboration s’étendrait bien au-delà de cette période d’engagement contractuelle », ajoute Nicholas Traynor. Seuls des travaux au long cours pouvaient en effet permettre d’atteindre l’objectif de Starlight+ : développer des lasers de haute qualité, en particulier pour des applications quantiques.

Un laser à fibre d’une puissance inédite


Cette conviction initiale s’est ensuite confirmée, puisque le laboratoire commun n’a, depuis, jamais cessé ses activités, hébergées au sein de l’Institut d’Optique d’Aquitaine. Ce sont donc plus de dix années de recherche qui ont déjà uni le LP2N et TOPTICA Photonics SAS, avec 25 publications scientifiques issues de leurs travaux conjoints et de nombreuses réussites à leur actif. « Nous avons notamment relevé le défi de la montée en puissance de nos lasers à fibre, jusqu’à atteindre des niveaux alors inédits », cite Germain Guiraud. « Cela impliquait de comprendre le bruit et les effets provoqués par une puissance aussi élevée, afin de les réduire ou de les compenser. Ces résultats ont abouti à la commercialisation d’un laser de 130 W, qui reste aujourd’hui, sur le marché, celui présentant le plus faible niveau de bruit pour une telle puissance. » Des résultats de premier ordre qui sont en adéquation avec les fortes exigences d’applications telles que la détection d’ondes gravitationnelles.

La réduction de bruit constitue d’ailleurs le fil rouge du laboratoire commun Starlight+. « Nous avons développé une expertise unique en la matière », affirme Nicholas Traynor. « Pour cela, nous nous sommes inspirés de techniques employées par des technologies sonores telles que le Dolby, mises au point il y a des dizaines d’années. Celles-ci procèdent à des traitements a posteriori pour diminuer le bruit et, ainsi, améliorer la qualité audio. Des principes sur le son que nous appliquons à la lumière. » Une approche baptisée « noise eater », c’est-à-dire « mangeur de bruit ».

La qualité des travaux menés dans le cadre de Starlight+ a contribué à la reconnaissance des deux partenaires. Une visibilité qui a parfois pris la forme de récompenses, comme avec le prix FIEEC Carnot de la Recherche Appliquée obtenu par Giorgio Santarelli en 2021, pour sa collaboration avec Azurlight Systems.

Starlight+ reparti pour dix ans et plus encore ?


Au-delà de ces avancées scientifiques majeures, le laboratoire commun a œuvré dans la formation de jeunes chercheurs et chercheuses, avec notamment quatre thèses CIFRE. Et chacun de ces doctorants a fini par être recruté par TOPTICA Photonics SAS, à commencer par… Germain Guiraud, dont la thèse avait débuté avant même le lancement officiel de Starlight+.

Plus de dix ans après ses débuts, le laboratoire commun n’est pas près de fermer ses portes. Et pour cause : les défis restent multiples. « Le fonctionnement d’un ordinateur quantique nécessite cinq ou six lasers, chacun assurant une fonction différente, donc présentant une longueur d’onde spécifique », note Germain Guiraud. « Et le passage à l’échelle de l’ordinateur quantique va impliquer une puissance toujours plus élevée, tout en maintenant les exigences quant aux propriétés spectrales. »

À cet effet, l’intégration de ce qui s’appelait à l’époque Azurlight Systems au sein du groupe TOPTICA s’accompagne de prometteuses perspectives. « Nous avons désormais à notre disposition un éventail bien plus vaste de technologies sur lesquelles nous pouvons nous appuyer », s’enthousiasme Nicholas Traynor. « D’autant que nos forces sont complémentaires. Avant notre acquisition, la devise du groupe TOPTICA était : "All wavelengths" – "toutes les longueurs d’onde" –, pour sa capacité à fournir des lasers couvrant une grande partie du spectre lumineux, mais à des niveaux de puissance limités. Avec notre maîtrise de la haute puissance, mais sur un éventail moins large de longueurs d’onde, nous pouvons ajouter : "All the power" – "toute la puissance". »