L’érosion des sols de montagne accélérée par les activités agro-pastorales depuis 3800 ans

Environnement

Durant les 3 800 dernières années, les activités agro-pastorales ont accéléré l’érosion des sols alpins à un rythme 4 à 10 fois plus rapide que leur formation naturelle. L’histoire de cette érosion vient d’être décryptée pour la première fois, par une équipe de recherche menée par des scientifiques du CNRS1 . Ils révèlent que les sols de hautes altitudes ont été dégradés les premiers, sous l’effet combiné du pastoralisme et du déboisement facilitant le déplacement des troupeaux. Les sols de moyenne puis de basse altitude ont ensuite été érodés suite au développement de l’agriculture et de nouvelles techniques, comme l’emploi de la charrue, de la fin de l’époque romaine à l’époque contemporaine. L’étude révèle également que l’accélération de l’érosion des sols de montagne par les activités humaines n’a pas débutée partout dans le monde de manière synchrone. 

Ces travaux, à paraitre dans la revue PNAS la semaine du 14 juillet, viennent renforcer la conclusion d’une précédente étude2  des auteurs. Dans un contexte mondial de dégradation des sols affectant leur fertilité, leur biodiversité, le cycle de l’eau et du carbone, les auteurs appellent à un déploiement mondial des mesures de protection.

Ces conclusions ont été obtenues en comparant la signature des isotopes du lithium dans les sédiments du lac du Bourget à celles relevées dans les roches et sols actuels. Les relevés ont été effectués sur le plus grand bassin versant des Alpes françaises3 . Les données obtenues ont ensuite été comparées à celles provenant d'autres régions du monde4 . L’ADN contenu dans les sédiments a également été étudié pour identifier les mammifères et végétaux en présence à chaque période. 

Pastoralisme dans les Alpes. A l’heure où l’érosion des sols menace nos sociétés en impactant la biodiversité, le stockage du dioxyde de carbone et les capacités de production alimentaire, il est fondamental d’étudier et de quantifier ses causes.
© Julia GARAGNON / LSCE / CNRS Images
Barge de carottage sur le lac du Bourget, en Savoie, lors du carottage des sédiments accumulés dans le fond du lac. L'analyse via la géochimie isotopique de la carotte sédimentaire prélevée a permis de reconstituer 10 000 ans d’évolution de l’érosion dans les Alpes européennes.© William RAPUC / EDYTEM / CNRS Images
  • 1Relevant du laboratoire Environnement dynamique et territoires de la montagne (CNRS/Université Savoie Mont Blanc) et de l’Institut de physique du globe de Paris (CNRS/Institut de physique du globe de Paris/Université Paris Cité). Le laboratoire Géosciences Paris-Saclay (CNRS/Université Paris Saclay) est également impliqué. Des scientifiques de l’Université Paris-Saclay, de l’Université Savoie Mont Blanc et de l’Institut de physique du globe de Paris ont aussi participé à ces travaux.
  • 2//doi.org/10.1038/s41467-024-45123-3
  • 3Le bassin versant en question s’étend du bassin de Chambéry au sommet du Mont Blanc.
  • 4Les Andes et l’Amérique du Nord.
Bibliographie

Human and climate impacts on the alpine Critical Zone over the past 10,000 years. William Rapuc, Damien Guinoiseau, Fabien Arnaud, Mathieu Dellinger, Pierre Sabatier, Jérôme Gaillardet, Jérôme Poulenard et Julien Bouchez. PNAS, semaine du 14 juillet 2025.

Contact

William Rapuc
Chercheur CNRS
Aurélie Meilhon
Attachée de presse CNRS