Les anticorps de lama : nouvelle piste thérapeutique contre la schizophrénie

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  • Des nanocorps ont été conçus à partir d’anticorps de lamas pour cibler un récepteur clé du cerveau impliqué dans la schizophrénie.
  • Injectés par voie périphérique, ces mini-anticorps franchissent la barrière hémato-encéphalique pour atteindre le cerveau.
  • Le traitement améliore les fonctions cognitives dans deux modèles animaux de la maladie.

Les lamas possèdent un type particulier d’anticorps à partir desquels des scientifiques viennent de produire des mini-anticorps. Ces « nanocorps » traversent facilement la barrière biologique qui protège les cellules du cerveau11 , ce qui les rend plus efficaces que les anticorps utilisés jusqu’alors dans les traitements.  Biodégradables et associés à des effets secondaires limités, ils représentent aujourd’hui la promesse d’une nouvelle génération de traitements de la schizophrénie. Ces résultats, portés par des scientifiques du CNRS, de l’Inserm, et de l’Université de Montpellier22 , sont publiés dans la revue Nature le 23 juillet 2025.

  • 1Structure naturelle qui protège le cerveau en filtrant les substances présentes dans le sang. Elle empêche la plupart des molécules de pénétrer les cellules du cerveau, ce qui rend difficile l’administration de traitements ciblant ces cellules.
  • 2 

Si les traitements actuels de la schizophrénie - maladie mentale touchant 1% de la population mondiale - permet de réduire certains symptômes, ils n’agissent que très peu sur les troubles cognitifs affectant la vie quotidienne des patients. 

Des scientifiques de l’Institut de génomique fonctionnelle (CNRS/Inserm/Université de Montpellier) viennent de concevoir un nanocorps issu d’anticorps de lamas, capable d’activer spécifiquement un récepteur au glutamate impliqué dans la régulation de l’activité des neurones. Pouvant être administrée par voie veineuse ou musculaire de manière périphérique, cette nouvelle molécule a démontré sa capacité à franchir la barrière hémato-encéphalique et à atteindre efficacement leurs récepteurs dans le cerveau.

L’effet thérapeutique de ces nanocorps a été évalué dans deux modèles précliniques de la schizophrénie. L'administration du nanocorps a permis de corriger les troubles cognitifs observés chez ces deux modèles murins : les fonctions cognitives des animaux s’améliorent nettement dès la première injection, avec un effet prolongé pendant plus d’une semaine.

Des études cliniques seront désormais nécessaires pour démontrer que cette capacité à corriger les troubles cognitifs via une injection périphérique peut constituer une nouvelle piste de traitement de la schizophrénie. Ces travaux confirment le potentiel des nanocorps comme nouvelle stratégie thérapeutique pour agir sur le cerveau, leur utilisation pouvant à terme être élargie au traitement d’autres maladies neurologiques.

Jeune lama né à proximité du camp de base au début de l'expédition Ice Memory en Bolivie.
© Bruno JOURDAIN / IGE / CNRS Images
Bibliographie

Nanobody therapy rescues behavioural deficits of NMDA receptor hypofunction. Mathieu Oosterlaken, Angelina Rogliardo, Tatiana Lipina, Pierre-André Lafon,Mireille Elodie Tsitokana, Mathilde Keck, Héloïse Cahuzac, Pierre Prieu-Sérandon,Séverine Diem, Cécile Derieux, Célia Camberlin, Chrystel Lafont, Damien Meyer, Patrick Chames, Franck Vandermoere, Philippe Marin, Laurent Prézeau, Denis Servent, Ali Salahpour, Amy J. Ramsey, Carine Bécamel, Jean-Philippe Pin, Julie Kniazeff & Philippe Rondard, Nature, 23 Juillet 2025.
DOI : 10.1038/s41586-025-09265-8

 

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Jean-Philippe Pin
Chercheur CNRS
Julie Kniazeff
Chercheuse CNRS
Philippe Rondard
Chercheur Inserm
CNRS - Service de Presse