L’Observatoire Vera C. Rubin dévoile les premières images du ciel prises avec la plus grande caméra du monde

Univers

L’Observatoire américain Vera C. Rubin, situé au Chili, dévoile ses toutes premières « méga » images du cosmos obtenues grâce aux propriétés exceptionnelles de sa caméra du LSST, la plus grande caméra du monde, et de son optique à large champ. Sa conception aura nécessité près de deux décennies et mobilisé plusieurs centaines de scientifiques du monde entier, dont plusieurs équipes du CNRS. La présentation mondiale se tient le 23 juin à l’Académie nationale des sciences de Washington.

C’est tout simplement inédit ! Grâce à son capteur de 3200 mégapixels et à l’optique large champ du télescope de l’observatoire Vera C. Rubin1 , l’imposante caméra du LSST (Legacy Survey of Space and Time), grosse comme une voiture, peut photographier d’un seul tenant d’énormes portions du ciel équivalente à 45 pleines lunes. De quoi immortaliser en haute définition et dans six couleurs différentes l’intégralité de la voûte céleste australe en seulement trois nuits de prises de vue. Un an après son acheminement depuis les États-Unis jusqu’à l’Observatoire Vera C. Rubin au Chili, ses premières « méga » images sont révélées le 23 juin, à l’occasion d’une conférence de presse tenue à l’Académie nationale des sciences de Washington. Cette première mondiale est la consécration de 25 ans d’études et de construction par une collaboration internationale, à laquelle plusieurs équipes de recherche du CNRS2  ont participé. 

La qualité exceptionnelle de ces premières images montre que le télescope est fin prêt pour démarrer sa mission : pendant 10 ans, toutes les trois nuits, en quelque 1000 prises de vues haute définition et dans six bandes de couleur, il scannera l’intégralité du ciel de l’hémisphère Sud. Mis bout à bout, ces scans fourniront un film haute définition et en quatre dimensions de l’évolution de l’Univers. Le projet générera par ailleurs, sur les dix années du projet, une vue du ciel austral d’une richesse et d’une profondeur totalement inédite, qui révélera jusqu’aux objets les plus ténus et les plus lointains du cosmos. Ce vaste relevé révélera pour la première fois à grande échelle les moindres changements de l’Univers, qu’il s’agisse de phénomènes célestes proches (astéroïdes, comètes, etc.) comme très lointains (supernovæ, etc.). Il permettra des avancées majeures en cosmologie, dans l’étude de la matière noire et de l’énergie noire, ou encore dans la compréhension de notre système solaire.

Le CNRS, partie intégrante de ce projet international

Ce projet est porté par le département de l’énergie américain et la Fondation nationale pour la science (NSF) américaine. Le Laboratoire national de l’accélérateur SLAC National Accelerator Laboratory est responsable de la construction de la caméra du LSST. Partenaire historique du CNRS, SLAC a fait appel aux scientifiques de l’organisme afin de participer à l’élaboration du plan focal de la caméra ainsi qu’à la conception et à la construction de son changeur de filtres robotisé. Ce dernier permet de changer automatiquement 5 à 15 fois par nuit les filtres de couleurs dont est dotée la caméra, pesant entre 24 et 38 kg chacun. En mesurant la quantité de lumière que les objets célestes émettent et en confrontant les images prises à travers les différents filtres, il est possible de déterminer avec précision leur position et distance par rapport à la Terre. D’autres scientifiques du CNRS contribuent au développement de l’infrastructure informatique qui permettra de traiter quantitativement et qualitativement la somme colossale d’images des quelque 17 milliards d’étoiles et 20 milliards de galaxies observables qui seront collectées. Un véritable travail de fourmi visant à constituer le catalogue de données sur l’Univers le plus complet possible. 

Les données recueillies seront stockées à raison de 20 téraoctets par nuit. En France, le Centre de calcul de l’IN2P3 (CNRS) à Lyon contribuera à leur stockage et à leur traitement, à hauteur de 40% des images brutes. Ces données seront mises, à intervalles réguliers, à la disposition des scientifiques du monde entier, favorisant des découvertes révolutionnaires et des avancées majeures sur les décennies à venir.

Pourquoi développer un télescope au sol ?

Si 25 télescopes spatiaux sont actuellement en activité, les instruments d’observation au sol demeurent incontournables pour documenter l’Univers de manière intégrale. Plus grands, ils possèdent une meilleure sensibilité et confèrent en conséquence des captations de plus haute précision. Ces instruments permettent également d’enregistrer des volumes de données plus importants que les instruments spatiaux, le téléchargement à distance des données enregistrées par ces derniers demeurant encore complexe à ce jour. Enfin et surtout, les télescopes au sol ont l’avantage de pouvoir être réparés et améliorés avec des outils toujours plus performants. Ainsi, doté de cette caméra à la pointe de la technologie, l’Observatoire Vera C. Rubin vient compléter la cinquantaine d’infrastructures et outils d’observation du cosmos mis en service sur Terre et au-delà de son atmosphère.

gas cloud in space
Cette image combine 678 images distinctes prises par l'observatoire Vera C. Rubin de la NSF-DOE en un peu plus de sept heures d'observation. La combinaison de plusieurs images de cette manière révèle clairement des détails autrement faibles ou invisibles, tels que les nuages de gaz et de poussière qui composent la nébuleuse Trifide (en haut à droite) et la nébuleuse de la Lagune, qui se trouvent à plusieurs milliers d'années-lumière de la Terre. © NSF-DOE Observatoire Vera C. Rubin.
énorme caméra vue de trois quarts dans ne pièce blanche
Photographie de la caméra, avec l’un des filtres de couleur positionné. © Olivier Bonin/SLAC National Accelerator Laboratory.

Pour en savoir plus sur la caméra LSST : La plus grande caméra astronomique du monde bientôt prête à scruter le ciel | CNRSlsst.fr

Pour en savoir plus sur l’Observatoire Vera C. Rubin : rubinobservatory.org

  • 1Du nom de l’astronome américaine Vera C. Rubin qui fut la première à établir la présence de matière noire dans les galaxies.
  • 2Issues du Centre de Calcul de l’IN2P3 (CNRS), Centre de physique des particules de Marseille (CNRS / Aix-Marseille Université), Laboratoire Astroparticule et cosmologie (CNRS / CEA / Université Paris Cité / Observatoire de Paris), Laboratoire d’Annecy de physique des particules (CNRS / Université Savoie Mont-Blanc), Laboratoire de physique de Clermont Auvergne (CNRS / Université Clermont Auvergne), Laboratoire de physique subatomique et de cosmologie (CNRS / Université Grenoble Alpes), Laboratoire de physique nucléaire et de hautes énergies (CNRS / Sorbonne Université / Université Paris Cité), Institut de physique des 2 infinis de Lyon (CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1), Laboratoire de physique des 2 infinis Irène Joliot-Curie (CNRS / Université Paris-Saclay / Université Paris-Cité) et Laboratoire Univers et particules de Montpellier (CNRS / Université de Montpellier).

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Chercheur CNRS
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Attachée de presse CNRS